Madelaine, ce one-shot devenu trilogie !
Je consulte régulièrement les notes que je prends, et voilà que je retrouve les premières ébauches de ce qui est devenu une trilogie, « Madelaine ». Au départ, comme me le rappellent ces mots hâtivement couchés sur le papier, il était évident que l'histoire, découpée en vingt-cinq chapitres succincts, ne ferait l'objet que d'un seul volume. Tout y était. Les noms, les lieux, les faits essentiels, même les rebondissements qui ne manqueraient pas d'advenir, jusqu'à la scène finale. Mais, comme avec mes précédents romans, mes personnages en ont décidé autrement. Et pourtant, cette fois, je pensais avoir pris toutes les précautions pour les contenir aux rôles que je leur avais assignés. Madelaine, Marcellin, Auguste, les Martinaud, tous avaient reçu le scénario et aucun n'avait trouvé à redire. Rien, pas une remarque. C'est là que j'aurais dû me méfier, parce que, derrière les sourires polis et une acceptation de façade du sort que je leur réservais, je percevais malgré tout comme des réticences. Madelaine, la première, m'a reproché d'aller un peu vite en besogne. Puis c'est Marcellin qui a babillé des mots incompréhensibles, mais que je devinais désapprobateurs, à refuser de quitter les bras de Marie Soullard, que j'avais pourtant expédiée en deux phrases. Genre : « elle lui donne le sein, il tète ». A l'en croire, elle méritait mieux, celle dont il caressait la tétine avec délicatesse, là où les autres marmots y mordaient de toute la force de leurs gencives. Auguste, lui, ricanait dans mon dos. Il me faisait remarquer combien mes mots peinaient à dire la violence des maux qu'il savait imposer. Quant aux Martinaud, je voyais bien, à leurs yeux fatigués, qu'ils auraient aimé que je dise toute la beauté et la sauvagerie de leur montagne plutôt que de m'attarder à ces querelles de clocher qu'ils me suspectaient de vouloir raviver. Alors, je me suis posé, je les ai regardés dans les yeux et je leur ai dit : « Montrez-moi ! » Et voilà comment un roman devient une trilogie...

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