La gigue des féroces : noir, c'est noir !

 

La gigue des féroces

J'ai commis un deuxième ouvrage. Bien pire dans la violence et le raisiné qui coulait à flots. Sur fond de vendetta dans un village éperdu de vent, j'y massacrais la langue française avec une rare jouissance, inventant des mots et un phrasé à l'opposé d'un Proust et de l'intrication de ses phrases à rallonge. Trois mots suffisaient souvent à faire la blague quand une phrase ne se résumait pas à un seul. J'allais à l'essentiel. Du moins le croyais-je, du haut de ma suffisance. Parce que, celui-là aussi, j'ai cru utile de le faire parvenir à des éditeurs, évitant cependant celui qui m'avait si férocement remis à la ma place et qui, je n'en doute pas, m'aurait fait parvenir, en retour, une boîte de pilules pour en finir une fois pour toutes avec mes prétentions d'écrivaillon... Cette fois, pas de réponse. Un silence assourdissant, comme disent les écrivains en mal d'inspiration dans l'imagerie. Jusqu'à ce que je croise la route de François Guérif, l'icônique créateur et directeur de l'une des plus belles collections littéraires, Rivages/noir, qui aura fait découvrir à la France entière et à moi, bien plus modestement, des auteurs comme James Ellroy, James Lee Burke ou Tony Hillerman. Il a la gentillesse de lire ma prose et de ne pas la trouver aussi mauvaise que ses confrères. Tout en me faisant comprendre que ce n'est pas sa came. Mais il m'oriente vers le Fleuve Noir qui lance l'ambitieuse Collection Noire, clin d'œil à couverture blanche à la Série Noire. Sa directrice littéraire cherche de nouveaux auteurs « connus ou inconnus pourvu qu'ils aient du talent ». Vous dire ma fierté d'être ainsi distingué à me retrouver au milieu de Patrick Mosconi, G.-J. Arnaud, Michel Quint ou J.-M. Valente !... La gigue des féroces paraît en septembre 1988. Je suis fier comme Artaban. Mais l'indifférence avec laquelle le roman est accueilli va doucher sérieusement mon enthousiasme...


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