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Affichage des articles du septembre, 2025

Alice et les quarante voleuses

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Quand j’ai cherché un moyen de financer la vengeance de Madelaine, j’ai imaginé la création d’un gang de soubrettes, trahissant leurs employeurs pour les dépouiller, mais obéissant à un code d’honneur leur interdisant de se voler entre elles et, surtout, de conserver le montant de leur butin. «   Vous nous donnez les informations, nos petites mains se chargent du vol, et l’on partage le fruit de nos rapines entre toutes, à parts égales   ». Et voilà qu’en épluchant la presse londonienne à la recherche de voleuses «   célèbres   », je découvre l’existence des Forty Elephants (les quarante éléphants) qui défrayent la chronique et mettent «   la police de Londres sur les dents   », comme l’écrit le journal Le Radical en septembre 1925. Comme mes soubrettes, ces voleuses prenaient pour cible de riches familles chez qui elles se faisaient engager grâce à de fausses lettres de recommandation. Je suis donc parti sur leurs traces.     Mary Carr , la première grande reine des 40 Elep...

De la consanguinité au sobriquet

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Lorsque mon petit Marcellin doit quitter les Martinaud, il se retrouve aux Morets , un petit village perdu dans la montagne des Hautes-Alpes . Là, n’y vivent que quelques familles, dont celle de Jean Le Césure. J’y évoque brièvement la consanguinité et les mariages entre cousins qui ont fini par pervertir leur sang. J’y parle de ces surnoms ou sobriquets que tous ont dû prendre afin de se reconnaître, la majorité portant le même nom de… famille   ! Ce n’est pas qu’un effet de style du romancier, mais le reflet d’une réalité. À Brison-Saint-Innocent , en 1868, sur 1   030 individus recensés, on dénombre 98 Curtelin, 96 Bollard, 58 Michaud, 53 Mantel, etc. Et autant de sobriquets pour les différencier : Le Rouge, L’Avocat, La Coqua, Pipil, Grand Crucifix, Borgne,… Cette manière de faire n’est évidemment pas réservée à ces populations repliées sur elles-mêmes. J’ai ainsi plusieurs aïeux portant le même nom et le même prénom (Jean Dupuy) qui se sont fait appele...

Newgate, la Bastille anglaise

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Au moment où Madelaine entre dans la prison de Newgate ( Newgate Gaol , en anglais dans le texte), il s’y trouve près de 900 criminels en tous genres et 325 débiteurs (dont 40 femmes). Le tout pour une capacité limitée à… 490 personnes   ! On s’y entasse dans des salles hautes de 11 pieds (3,35 m environ), meublées de lits en fer ou en bois, de sommiers à lattes parfois, en bois lisse la plupart du temps, de nattes roulées sur le côté dans la journée, de vagues couvertures pour les plus malchanceux. Le mobilier est aussi chiche que rustique, généralement une grande table en bois et des bancs. Il n’y a pas de geôle à proprement parler et les portes restent ouvertes la journée, surveillées par des gardes-chiourmes, en fait des prisonniers transformés en matons qui ont le privilège de disposer d’un bat-flanc. Seuls les quartiers sont isolés les uns des autres, celui des hommes de celui des femmes, et ces deux-là des débiteurs. On ne s’y mélange plus comme par le pa...

Le livre papier, dernier refuge de l'insolence

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  En lisant Le Monde , ce matin, je n’ai pu m’empêcher d’applaudir des deux mains au combat de la romancière américaine, Lauren Groff ( Furies, Matrix, Terres indomptées ), entrée en résistance contre la Trumperie et, plus généralement, ce révisionnisme intellectuel qui frappe notre société, à vouloir interdire les idées qui dérangent. En réaction au bannissement de milliers de livres qui racontent le monde tel qu’il est et non tel que les ligues rétrogrades, passéistes, liberticides, racistes, colonialistes, machistes, en un mot, fascistes voudraient pour demain, elle a ouvert une librairie dans laquelle elle vend tous ces ouvrages désormais interdits ( The Lynx , à Gainesville , une ville de 140000 habitants, dans le nord de la Floride). J’aime l’idée qu’une librairie constitue un rempart contre la bêtise, la censure et la dictature des mots imposés par les réseaux sociaux et le déversement des fake news et idées nauséabondes qui y circulent. Surtout dans un pays qui, au...

François Benjamin Courvoisier, le “lordicide”

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  Dans le deuxième tome des aventures de Madelaine , j’évoque brièvement un personnage, François Benjamin Courvoisier, dont la pendaison, le 6 juillet 1840, a attiré une foule considérable, autour de 40   000 personnes, presque autant que pour ma pauvre Mary Claypole . Parmi ces spectateurs, un certain Charles Dickens qui, et c’est le moins que l’on puisse dire, n’apprécie guère ce moment, au point de militer ensuite contre ces exécutions satisfaisant les plus bas instincts de la populace londonienne. Mais qui est donc ce Courvoisier   ? L’homme est né en Suisse, en août 1816 (la date exacte est toujours inconnue à ce jour), dans le petit village de Mont-la-Ville . Un minuscule bout de terre agricole du canton de Vaud , situé dans le district de Morges , au pied du Jura . On dit de l’endroit qu’il offre une vue imprenable sur la plaine, le lac Léman et la Savoie . Pour le jeune Benjamin, c’est le trou du cul du monde. Quatre cents habitants recroquevillés sur leurs trad...